Etant lunatique, Némésis peux être détachée, méfiante, renfermée, mais elle peux également devenir enragée, passionnée.
Son caractère est très aléatoire depuis sa récente transformation en homiférée.

Depuis combien de temps suis-je ici, à observer le monde dans sa folle course qui semble pourtant si infiniment lente à mes yeux ?
Je suis devenue un de ces observateurs, stoïque, impassible face aux civilisations qui naissent et qui se meurent, face aux empires qui se construisent et qui s'écroulent.
A bien des égards, la vie d'une noble peut sembler passionnante pour quelqu'un qui l'observe de loin, mais comme bien souvent, la réalité est bien loin du compte.

Depuis mon plus jeune âge, j’étais bercée par la monotonie de ma routine propre à la haute société. C'était un balai rituel qui commençait par les servantes venant ouvrir les lourdes tentures qui me coupaient du monde extérieur. S'ensuivait la séance d'habillage où, malgré ma condition en comparaison de celle des servantes, on ne me laissait pas droit de parole. Prisonnière de mon corset, je me glissais hors de ma chambre sous bonne escorte pour rejoindre le salon où je prenais mes repas seule la plupart du temps, si on faisait abstraction des statues vivantes que constitue les gardes et les servants.

Du reste, je ne me souviens pas précisément de ce jour-là, un jour que j'aurais dit fatidique si j'avais voulu forcer la tournure dramatique de mon récit. Cela fait si longtemps que mon avis sur les événements a dû changer un nombre incalculable de fois.

Comme toute jeune noble ayant atteint l'âge de se marier, j'assistais presque quotidiennement à des bals. Il m'est forcé de reconnaître que ce n'était pas pour me déplaire, j'ai toujours aimé jouer de mes charmes pour tromper l'ennui. Quel jeu fascinant que de souffler le chaud et le froid auprès de ces hommes, jeune et moins jeunes, parfois même alors que leurs épouses ou promises sont juste à côté.

Ce soir-là, l'ennui commençai à prendre place dans mon esprit, j'ai donc pris partis de quitter la fête pour rentrer dans la demeure familiale, à cheval, entouré d'un serviteur et d'un garde.
Nous avons emprunté le même chemin que nous empruntions à chaque fois, le trajet était relativement calme et tout s'est passé très vite, d'une façon bien trop confuse pour mon esprit mortel. Subitement, j'ai vu le garde chuter de son cheval, je l'ai entendu s'écraser sur les pavés en contrebas et l'instant d'après les chevaux s'emballaient. Sans doute étaient-ils effrayés, mais qui les en aurait blâmé ? J'étais moi-même terrorisée par la situation, sans même savoir pourquoi et m'accrochais désespérément à ma monture alors que celle-ci partait au galop.
Je ne tins pas bien longtemps en selle et fini par lâcher prise seulement quelques mètres plus loin, ma tête heurtant le sol. Je me souviens avoir eu l'impression, avant de perdre connaissance, qu'une bête féroce c'était jetée sur moi pour finir le travail.

Je ne saurais pas dire combien de temps s'est écoulé avant que je ne me réveille, réalise ma nouvelle condition et me décide à accepter cette nouvelle vie. La chronologie des faits devient sans intérêt après quelques centaines d'années mais le fait est que j'ai fini par m'adapter.
J'ai traversé quelques époques dans l'ombre, comme mes semblables.
Je suis devenue écrivaine, ce qui m'a permis d'écrire mon histoire en faisant passer cela pour de la simple fantaisie, mais quand notre espèce s'est dévoilé au grand jour, j'ai pris soin d'effacer de disparaître pour limiter les risques.

Mais si j'avais su que le danger résidait plus dans mes congénères, je me serais davantage méfiée.

J'avais déjà subi les assiduités de plusieurs hommes au cours des siècles, mais aucun qui ne m'avait autant mise mal à l'aise et qui avait à ce point « mal tournée ».
Mon intérêt pour les hommes n'avait guère évolué, ils n'étaient qu'une occupation mais celui-ci n'a visiblement pas apprécié que je me joue de ses sentiments.
Il connaissait visiblement toutes mes habitudes et n'a eu aucun mal à me piéger dans un coin tranquille pour m'injecter quelque chose.
Je n'avais pas encore entendu parler du virus crée à Downside, je ne saurais même pas dire comment il avait pu s'en procurer, mais voilà que j'en étais victime.
Je me souviens d'avoir été emmenée de force dans un immeuble relativement moderne, mais pour la suite, je ne saurais différencier ce qui était de l'ordre de la divagation, des hallucinations et ce qui était vrai. Je n'ai pas tenu bien longtemps avant de m'écrouler dans le coma, j'étais moi-même devenue une bête féroce qui cherchait à se défendre à tout prix, mais contre quoi ? Le fait de me débattre dans le vide m'avait épuisé bien plus vite que le virus ne l'aurait fait en temps normal.

Je me souviens m'être réveillée couverte de sang, avec une douleur affreuse au cou, mais avant même de comprendre ce qui m'arrivait j'ai profité que mon agresseur soit absent pour fuir sans savoir qu'au fil des semaines, mes recherches me mènerais à Downside pour y trouver des réponses.